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Portée de l’acceptation par avenant au contrat de travail d’une rétrogradation disciplinaire

La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 14 avril 2021 (n°19-12.180) répondant pour la première fois – selon nous – à la problématique de la contestation d’une rétrogradation disciplinaire alors que le salarié l’a précédemment acceptée.

Obligation d’accepter la sanction…

Un salarié occupait les fonctions de responsable du patrimoine régional au sein d’une grande entreprise. Au terme d’une procédure disciplinaire, son employeur a choisi de le rétrograder. Cette sanction présente la particularité de devoir être acceptée par le salarié.

L’employeur a alors proposé au salarié cette rétrogradation disciplinaire au poste de bibliothécaire par avenant au contrat de travail. Le salarié a donné son accord et a signé l’avenant. En application de cet avenant, la fonction et la rémunération étaient modifiées.

Malgré cette modification régulière du contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour solliciter l’annulation de la sanction de rétrogradation.

Le salarié demandait alors au juge de le rétablir à son ancien poste avec le niveau de rémunération antérieurement perçu.

La Cour d’appel a rejeté la demande du salarié. Elle a considéré qu’il avait signé en connaissance de cause l’avenant de modification du contrat de travail. Elle a relevé que la mention « lu et approuvé » sur l’avenant attestait du consentement à la sanction. Selon la cour, le salarié ne pouvait plus revenir sur son acceptation de la modification de son contrat de travail.

La particularité de la rétrogradation disciplinaire, qui doit être acceptée par le salarié, l’empêche t’elle de contester le bien fondé de la sanction?

La question était donc de savoir si l’acceptation de la rétrogradation – soit l’accord à la modification du contrat de travail – valait acceptation en elle-même du bien fondé de la sanction notifiée.

Ou au contraire : est-ce que la simple signature d’un avenant au contrat de travail dans le cadre d’une rétrogradation disciplinaire doit priver le salarié de sa possibilité de contester le ou les faute(s) reprochée(s)?

Il convient de rappeler que les juges du fond ont l’obligation de contrôler la proportionnalité de la sanction à la faute commise.

En effet, il résulte des dispositions de l’article L1333-1 du code du travail que:

« En cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié ».  

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006901453

Et, il résulte des dispositions de l’article L1333-2 du code du travail que :

« Le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. »

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006901454

Mais une acceptation peu engageante…

La Chambre sociale a suivi le raisonnement développé dans l’intérêt du salarié. Elle a jugé que l’acceptation par le salarié d’une rétrogradation disciplinaire ne l’empêchait pas de contester ultérieurement la sanction.

L’acceptation ne préjuge pas du bien-fondé de la sanction ou de la régularité de la procédure disciplinaire.

En d’autres termes, il est distingué :

  • L’acceptation de l’avenant, qui ne vaut que pour la modification du contrat de travail ;
  • Du contrôle que les juges doivent opérer pour vérifier si la sanction était justifiée, régulière et proportionnée au regard des faits reprochés.

Par analogie..

De toute évidence, un salarié qui signe le reçu pour solde de tout compte ne renonce pas à son droit de contester le licenciement qui lui a été notifié. L’accord donné par le salarié ne peut produire d’effet au delà…